Après avoir exploré l’essence des Alpes avec Alpine Connections en 2024, et s’être immergé dans l’âpreté sauvage des Pyrénées lors de Pyrenees 300 en 2023, Kilian Jornet s’attaque à un nouveau continent : l’Amérique du Nord. Son prochain défi, States of Elevation, prévu pour septembre 2025, le propulsera au cœur des montagnes emblématiques des États-Unis, dans une traversée titanesque et en totale autonomie des « Fourteeners », ces sommets culminant à plus de 14 000 pieds (environ 4 270 mètres).
- Un parcours épique, étape par étape
- Le Colorado
- Étape 1 : La Continental Divide et la LA Freeway
- Étape 2 : La Front Range et les sommets emblématiques
- Étape 3 : Le défi technique de la Mosquito Range
- Étape 4 : Les géants des Rocheuses
- Etape 5 : L’Elks Traverse : une étape légendaire
- Etapes 6 : le Nolan’s 14, le défi le plus redouté du Colorado
- Etapes 7 : Pikes Peak
- Etape 8 : Sangre de Cristo – la traversée des Crestone
- Etape 9 : Sangre de Cristo – la Blanca Range
- Etape 10 : Des Sangre aux San Juan
- Etape 11 : Cinq dans les San Juan
- Étape 12 : Une journée épique dans les San Juan
- Étape 13 : Le final en apothéose dans le cœur sauvage du Colorado
- Cinq jours de transition à vélo : 875 km pour rejoindre la Sierra Nevada
- Etape 15 : Norman’s 13
- Etape 16 : White Mountain
- Etape 17 : Le Mont Shasta
- Le Colorado
Un parcours épique, étape par étape
Le Colorado
Étape 1 : La Continental Divide et la LA Freeway
Tout a commencé le 3 septembre, au nord-ouest de Boulder, avec l’ascension de la célèbre LA Freeway, une traversée de la ligne de partage des eaux continentale (Continental Divide) depuis le mythique Longs Peak (4 345 m). Un itinéraire déjà redoutable, rendu encore plus difficile par l’altitude soutenue, souvent supérieure à 3 600 mètres. Après cette première épreuve, Kilian a enchaîné avec une transition à vélo jusqu’à Echo Lake, direction la deuxième étape.

Étape 2 : La Front Range et les sommets emblématiques
Les 4 et 5 septembre, Jornet a enchaîné quatre fourteeners de la Front Range: Mt. Blue Sky, Bierstadt, Grays et Torreys. Une série de sommets techniques, suivis d’une nouvelle transition à vélo vers Breckenridge, puis vers le Quandary Peak, dans la chaîne de la Sawatch. Chaque ascension est une bataille contre le dénivelé, le manque d’oxygène et les variations de température.
Étape 3 : Le défi technique de la Mosquito Range
Les 5 et 6 septembre, place à la Mosquito Range, près de Leadville, la ville la plus haute des États-Unis. Au programme : Democrat, Cameron, Lincoln et Sherman, avant d’affronter le Holy Cross, l’un des fourteeners les plus isolés du Colorado. Une étape où la fatigue commence à se faire sentir, mais où la détermination reste intacte.

Étape 4 : Les géants des Rocheuses
Le 6 septembre, Kilian a relevé l’un des plus grands défis du projet : l’ascension du Mount Massive (4 398 m) et du Mount Elbert (4 401 m), les deux plus hauts sommets des Rocheuses, reliés en une seule poussée. Une performance physique et mentale, réalisée après une approche à vélo jusqu’au départ du sentier des Evergreen Lakes.
Une journée de « repos »… à vélo
Le 7 septembre, jour théoriquement dédié à la récupération, Kilian a tout de même parcouru 87 km à vélo entre Twin Lakes et Aspen, en direction de la chaîne des Elk. Une transition active pour préparer la suite de l’aventure.

En à peine cinq jours, les statistiques sont déjà vertigineuses :
- 13 fourteeners gravies
- 570 km parcourus (dont une partie à vélo)
- 80 heures d’activité cumulées
Des chiffres qui donnent le tournis, mais qui ne rendent pas compte des conditions extrêmes auxquelles l’athlète est confronté.
Les défis invisibles : froid, UV et déshydratation
Si les paysages sont à couper le souffle, le climat du Colorado ne pardonne pas. Kilian est souvent vu emmitouflé dans des couches de vêtements, même en plein effort. Deux raisons à cela :
- Le froid nocturne et matinal : à ces altitudes, les températures chutent brutalement, même en été.
- La lutte contre la déshydratation et les UV : l’air sec et raréfié du Colorado accélère la perte d’eau. Kilian a déjà perdu 5 kg en quelques jours, obligeant son équipe à ajuster sa stratégie d’hydratation et de nutrition. Autre danger : l’indice UV exceptionnellement élevé. À Denver (1 600 m d’altitude), l’exposition aux UV est déjà 25 % plus forte qu’au niveau de la mer. À 4 000 mètres, elle peut dépasser les 50 % de plus qu’en plaine. Les alertes UV sont fréquentes dans l’État, surtout en été, et les risques de brûlures ou d’épuisement sont réels.
Pour chaque 300 mètres d’altitude, les UV augmentent de 4 à 5 %. À 4 000 mètres, on parle d’un environnement presque hostile pour la peau et les yeux.
Pourquoi ce projet ?
Kilian Jornet ne cherche pas seulement à battre des records. « States of Elevation » est aussi une exploration des limites humaines, une façon de sensibiliser à la fragilité des écosystèmes de montagne et aux effets du changement climatique sur ces environnements extrêmes. Chaque étape est documentée, chaque défi partagé avec sa communauté, pour montrer à la fois la beauté et la rudesse de ces espaces préservés.

Etape 5 : L’Elks Traverse : une étape légendaire
Après une semaine d’efforts intenses à travers les Rocheuses, Kilian Jornet a franchi un nouveau cap dans son projet « States of Elevation » en réalisant l’Elks Traverse, une traversée mythique des Elk Mountains, au sud-ouest d’Aspen. Considérée comme l’une des routes les plus techniques et exigeantes du Colorado, cette étape de 80 km avec peu de sentiers balisés, des kilomètres de hors-piste sur un terrain accidenté a marqué un tournant dans son aventure.

« Les premiers jours ont été très difficiles à cause du décalage horaire et de l’altitude, mais aujourd’hui, sur la traversée, je me suis senti vraiment bien », a-t-il partagé, visiblement soulagé
L’Elks Traverse n’est pas une simple randonnée. C’est un itinéraire légendaire est réputé pour son terrain instable, la météo imprévisible et son isolement
Avec cette traversée c’est Sept fourteeners en une journée de plus dans la quête de Jornet avec :
- Capitol Peak (4 308 m)
- Snowmass Mountain (4 297 m)
- Maroon Peak (4 317 m)
- North Maroon Peak (4 273 m)
- Pyramid Peak (4 274 m)
- Conundrum Peak (4 320 m)
- Castle Peak (4 352 m)
21h30 d’effort continu : la consécration d’une semaine de combat
Cette traversée a duré plus de 21 heures et 30 minutes, un effort titanesque après une semaine déjà chargée. « Après une première semaine difficile à cause du décalage horaire et de l’air raréfié du Colorado, cette journée a été une véritable révélation. J’ai ressenti une force constante du début à la fin, et j’ai pu profiter de tout ce que la montagne avait à offrir », a confié Kilian.
Un contraste saisissant avec les premiers jours du projet, où la déshydratation et la perte de poids (jusqu’à 5 kg) avaient mis son organisme à rude épreuve. Cette fois, la stratégie d’hydratation et de nutrition semble avoir porté ses fruits.
« La montagne ne se domine pas, elle se vit »

Etapes 6 : le Nolan’s 14, le défi le plus redouté du Colorado
À peine 3h30 de repos après l’Elks Traverse, et Kilian Jornet était déjà de retour sur les sentiers. Son prochain objectif ? Nolan’s 14, l’un des enchaînements de fourteeners les plus redoutés des États-Unis. Ce défi consiste à gravir 14 sommets de plus de 4 267 mètres dans la chaîne Sawatch, en une seule poussée. Un parcours de 160 km avec plus de 11 000 mètres de dénivelé positif.
Kilian avait déjà coché les deux premiers sommets de la liste, Mount Massive et Mount Elbert, le 6 septembre, avant de bifurquer vers l’Elks Traverse. Il lui restait donc 12 sommets à enchaîner pour boucler Nolan’s 14.

Un départ sous haute tension
Après une nuit de récupération minimaliste, Kilian a enfourché son vélo pour rejoindre Twin Lakes en passant par le col d’Independence Pass. Même pendant ce trajet, il a pris le temps d’un appel vidéo avec sa famille — un moment de réconfort avant de plonger dans l’inconnu.
C’est vers midi qu’il a attaqué la première ascension de cette nouvelle aventure : La Plata Peak (4 372 m), accompagné de Lewis Wu, le cofondateur de Coros. Dès le départ, les éléments se sont ligués contre eux : des feux de forêt ont forcé Kilian à modifier son itinéraire, ajoutant des kilomètres et de la fatigue mentale.

La nuit des tempêtes : Ellingwood Ridge et l’enfer météo
Les véritables difficultés ont commencé avec Ellingwood Ridge, une arête technique et exposée. Alors que Kilian progressait, un orage violent a éclaté, apportant pluie, grêle et neige l’obligeant à plusieurs pauses pour se mettre à l’abri. « On ne voit rien, le vent est incroyable, et la neige commence à coller », décrivait-il plus tard.
Malgré tout, Kilian a continué pour atteindre finalement son van d’assistance à 1h30 du matin. Malgré l’épreuve, il gardait le sourire, a mangé un repas chaud et a même réussi à dormir 30 minutes avant de repartir.
Une nuit blanche avec Sage Canaday
Au petit matin, Kilian a été rejoint par une légende de l’ultramarathon américain : Sage Canaday. Ensemble, ils ont affronté Mount Princeton, puis Mount Shavano, où la neige a de nouveau fait son apparition. « Courir dans ces conditions, c’est comme avancer dans un autre monde », a confié Kilian.

Les deux athlètes ont enchaîné les trois derniers sommets de Nolan’s 14, terminant vers 6h du matin, après près de 48 heures d’effort quasi-ininterrompu depuis le début de l’aventure.
Etapes 7 : Pikes Peak
Après 69 heures d’effort ininterrompu entre l’Elks Traverse et les 12 derniers sommets de Nolan’s 14, Kilian Jornet aurait pu s’accorder une journée de repos. Pourtant, le 11 septembre au matin, après seulement 3 heures de sommeil, une douche et un petit-déjeuner copieux, il était déjà de retour en selle. Même la fatigue accumulée n’a pas eu raison de sa détermination — au point qu’il a exceptionnellement bu du café, une habitude rare pour lui.
Je me sens plus fatigué que d’habitude, mais le corps suit encore. Il faut continuer.

160 km à vélo vers le Pikes Peak : le vent et la pluie en compagnons indésirables
Kilian a entamé une transition à vélo de 160 km en direction du Pikes Peak, l’un des fourteeners les plus emblématiques du Colorado. Comme souvent depuis le début de « States of Elevation », la météo n’a pas été clémente : vent violent et pluie battante ont rythmé son trajet.
Arrivé au pied de la montagne, après une sieste éclair de 30 minutes, il a été rejoint par deux figures de l’ultramarathon :
- Chris Myers, deuxième des Western States 2025.
- Hans Troyer, jeune étoile montante de la scène ultrarunning.
L’ascension du Pikes Peak a alors débuté à 20h30, dans la nuit déjà tombée.
Une ascension qui impressionne même les pros
Hans Troyer, encore sous le choc après la montée, n’a pas caché son admiration : « C’est incroyable de voir Kilian grimper à un tel rythme après tout ce qu’il a déjà enchaîné avant. C’est presque inhumain. »

Pourtant, Kilian a gardé son allure, comme s’il s’agissait d’une simple sortie d’entraînement.
La fatigue est là, mais la montagne te porte. Chaque sommet est une nouvelle énergie
Avec le Pikes Peak, Kilian porte désormais son compteur à 33 fourteeners gravies dans le cadre de « States of Elevation ».
Prochaine étape : les Sangre de Cristo Mountains
Kilian n’a pas le temps de savourer bien longtemps. Dès le lendemain, il se dirige vers un nouveau massif : les Sangre de Cristo Mountains, une chaîne réputée pour ses arêtes tranchantes, ses sommets isolés et ses conditions météo imprévisibles.

Une aventure qui dépasse le sportif
« States of Elevation » n’est plus seulement un projet d’alpinisme ou d’ultramarathon. C’est une exploration des limites humaines, une leçon d’humilité face à la nature, et une démonstration que la persévérance peut repousser les frontières de l’impossible.
Kilian Jornet, avec son sourire modeste et sa détermination sans faille, continue de montrer que la montagne n’est pas une adversaire, mais une partenaire.
On ne la domine pas, on apprend à vivre avec elle.
Etape 8 : Sangre de Cristo – la traversée des Crestone
Après être redescendu du Pikes Peak dans la nuit du 11 septembre, Kilian Jornet n’a pas perdu de temps. Dès l’aube du vendredi 12, il a enfourché son vélo de gravel pour une transition de 151 km en direction des Sangre de Cristo Mountains. Un trajet épuisant, sous une pluie battante et un vent glacial, qui a encore mis à l’épreuve sa résistance mentale et physique.

Arrivé en fin d’après-midi, les conditions météo se sont dégradées : pluie, vent violent, et des prévisions annonçant de la neige en altitude. Kilian a choisi la prudence : sieste dans le van, repas énergétique, et préparation minutieuse de son matériel (y compris la configuration d’un nouveau téléphone, essentiel pour la navigation et la sécurité).
« Parfois, la meilleure stratégie est d’attendre. La montagne ne bouge pas, et moi non plus si les éléments sont contre moi », a-t-il expliqué.
Première tentative nocturne : l’échec comme leçon
Vers minuit, Kilian s’est élancé seul vers Humboldt Peak, le premier sommet de cette nouvelle étape. Mais la montagne a rapidement rappelé qui commandait : tempête de neige, vent violent et froid mordant ont eu raison de cette tentative. Après une lutte, il a dû faire demi-tour, retournant au van pour se réchauffer et réévaluer.
Parfois, reculer, c’est avancer.

Deuxième chance : la traversée des Crestone, un rêve technique
Le samedi 13 septembre, malgré un vent toujours présent, le ciel s’est dégagé. Kilian a saisi l’opportunité pour tenter à nouveau sa chance, cette fois sur l’un des enchaînements des plus techniques et esthétiques du Colorado: la traversée Crestone. Son itinéraire ?
- Crestone Needle (4 317 m) – une arête effilée et exposée.
- Crestone Peak (4 359 m) – un sommet massif avec des passages rocheux délicats.
- Kit Carson Peak (4 316 m) – célèbre pour son « Kit Carson Avenue », une arête étroite et vertigineuse.
- Challenger Point (4 293 m) – souvent sous-estimé, mais tout aussi exigeant.
Pendant 10 heures, Kilian a évolué sur un terrain 100 % technique : scrambling (escalade sans corde), passages sur arêtes, et neige résiduelle rendant chaque appui précaire.
C’était exactement le genre de terrain que j’aime : engagé, varié, où il faut rester concentré à chaque instant
Les conditions étaient très difficiles la première nuit… beaucoup de neige, du vent à décorner un bœuf. Mais aujourd’hui, la traversée des Crestone était magnifique. C’est peut-être mon étape préférée du projet jusqu’ici.
La montagne t’apprend une chose : tu ne la domptes pas. Tu t’adaptes, ou tu échoues. Hier, j’ai choisi de vivre pour combattre aujourd’hui

Etape 9 : Sangre de Cristo – la Blanca Range
Après avoir bouclé la traversée des Crestone le samedi soir, Kilian Jornet n’a pas traîné. Dès l’aube du dimanche 14 septembre, il a enfourché son vélo pour une nouvelle transition, cette fois en direction de la Blanca Range, pour le 9ᵉ chapitre de « States of Elevation ».
Pour une fois, la météo semblait lui sourire : ciel dégagé, vent calme, et des températures fraîches mais supportables. « Quand la montagne te tend la main, tu la saisis », aurait pu dire le philosophe qu’il est.

La Blanca Range : un terrain de jeu ultime
À 8h du matin, Kilian s’est élancé vers ce qui allait devenir, selon ses propres mots, « son itinéraire préféré du projet ». La Blanca Range, c’est :
- Des arêtes exposées où chaque pas compte.
- Des passages en scrambling de classe 3 à 4 (escalade sans corde, mais avec des mains et des pieds bien placés).
- Des sommets enneigés malgré la saison, et un froid mordant en altitude.

Son parcours du jour ?
- Ellingwood Point (4 315 m) – une introduction technique avec des passages rocheux délicats.
- Blanca Peak (4 372 m) – le 4ᵉ plus haut sommet du Colorado, avec une arête finale à couper le souffle.
- Mount Lindsey (4 308 m) – moins technique, mais tout aussi exigeant en endurance.
- Little Bear Peak (4 293 m) – et son redoutable « Hourglass Couloir », un couloir rocheux et glissant surnommé « l’Entonnoir de la Mort » par les locaux.
Un enchaînement en mode « flow »
Contrairement aux étapes précédentes, marquées par des tempêtes et des reculs stratégiques, cette journée a été pure magie. Kilian a évolué avec une fluidité rare, comme s’il dansait sur les arêtes.
Je pense que les Sangre de Cristo sont, pour l’instant, ma chaîne de montagnes préférée ici aux États-Unis. C’est un terrain de jeu incroyable, avec des arêtes magnifiques et une roche solide. Aujourd’hui, je me sentais bien, j’ai pu pousser et simplement profiter de ce terrain technique. C’est comme les Elks, mais avec une meilleure roche

Pour lui, cette étape a été «comme une session d’escalade en haute montagne» – un mélange parfait entre défis techniques et plaisir pur.
Un retour au van… et une transition immédiate
De retour à la 19h, un rapide repas avant d’entamer une nouvelle transition à vélo.
Quand le corps dit oui, il faut écouter
🏔️ Sommets de 14,000 : 42

Etape 10 : Des Sangre aux San Juan
C’est une journée de transition vers un territoire familier qui attendait Kilian. Le 10ᵉ chapitre de « States of Elevation » a commencé par une traversée à vélo de 107 km à travers les paysages changeants du Colorado.
Lundi était une journée de transition, un passage des Sangre de Cristo aux San Juan. Enfin, nous voici dans l’un des endroits que je connais le mieux aux États-Unis, après avoir couru cinq fois la Hardrock 100. Ce sera sympa de faire quelque chose de différent cette fois-ci.
Après le vélo, place à la course à pied : 44 km sur les sentiers, dont une partie sur le mythique Continental Divide Trail, avant d’atteindre le sommet du San Luis Peak (4 077 m). Un fourteener moins technique que les précédents.

La journée s’est terminée par une courte transition à vélo jusqu’au campement de nuit, sous un ciel étoilé et des températures fraîches – une récompense bien méritée après une longue journée en mouvement. Pour une fois, les éléments ont joué en faveur de Kilian ; un temps parfait et une lumière dorée typique de l’automne.
Parfois, la montagne te rappelle pourquoi tu l’aimes. Aujourd’hui était l’une de ces journées.
Les San Juan Mountains : un retour aux sources
Kilian connaît les San Juan Mountains comme sa poche. C’est ici qu’il a remporté la Hardrock 100 à cinq reprises, une course mythique de 160 km avec 10 000 mètres de dénivelé. Mais cette fois, il ne s’agit pas d’une compétition – du moins une autre sorte de compétition. Une exploration libre, sans contrainte de temps, avec pour seul objectif de vivre la montagne différemment.

La Hardrock, c’est une course. Là, c’est une aventure. Je peux m’arrêter pour admirer un lac, changer d’itinéraire si un sommet m’appelle… C’est ça, la vraie liberté.
Trois jalons franchis :
Cette 10ᵉ étape a marqué trois caps symboliques dans « States of Elevation » :
📍 1 000 miles (1 609 km) parcourus
⬆️ 200 000 pieds (60 960 m) de dénivelé positif – soit 7 fois l’ascension de l’Everest.
⏱️ 200 heures d’activité – plus de 8 jours et 8 nuits en mouvement continu.
Des chiffres qui donnent le vertige, mais qui ne rendent pas compte de l’usure mentale et physique et des nuits blanches nécessaires pour tenir un tel rythme.
🏔️ Sommets de 14,000 : 43

Etape 11 : Cinq dans les San Juan
Ce mardi 16 septembre, Kilian Jornet s’est, une nouvelle fois levé avant l’aube avec un objectif ambitieux : gravir cinq fourteeners en une seule journée, répartis dans deux massifs distincts des San Juan Mountains.
Retourner ici, c’est comme retrouver de vieux amis. Chaque sommet a une histoire, chaque sentier un souvenir.
Deux sommets avant midi : Uncompahgre et Wetterhorn
Sous un ciel enfin dégagé, Kilian a attaqué dès les premières lueurs :
- Uncompahgre Peak (4 361 m) – reconnaissable à sa forme pyramidale et ses pentes douces.
- Wetterhorn Peak (4 405 m) – l’un des fourteeners les plus techniques et exposés du Colorado, avec des pas d’escalade en 4 et une arête finale vertigineuse.
Le Wetterhorn, c’est comme une escalade en haute montagne. Chaque prise compte, chaque mouvement doit être précis.

Transition à vélo et enchaînement de trois nouveaux sommets
Après ces deux premiers sommets, Kilian a enfourché son vélo de gravel pour une transition rapide vers Mill Creek Trailhead. Puis, sans temps mort, il a enchaîné : 3. Red Cloud Peak (4 301 m) – une ascension raide mais gratifiante. 4. Sunshine Peak (4 300 m) – souvent sous-estimé, mais offrant des vues à 360° sur les San Juan. 5. Handies Peak (4 309 m) – un sommet emblématique de la Hardrock 100, avec une crête large et des pentes herbeuses.
Une descente mythique en compagnie de légendes

Pour Handies Peak, Kilian n’était pas seul. Il a été rejoint par :
- Anna Frost – championne de trail et amie de longue date.
- Meghan M. Hicks – ancienne détentrice du record du Nolan’s 14 et rédactrice en chef d’iRunFar.
- Byron Powell – fondateur d’iRunFar et figure majeure de l’ultramarathon.
Courir avec des amis, surtout ici, sur ce terrain… c’est ça, l’esprit de la montagne. Pas de compétition, juste le partage.
🏔️ Sommets de 14,000 : 48

Étape 12 : Une journée épique dans les San Juan
Le mercredi 18 septembre, Kilian Jornet a vécu une nouvelle journée des plus intenses : 18 heures d’effort ininterrompu, quatre sommets mythiques et une aventure partagée avec des compagnons d’exception.
Un départ sous le soleil avec Dakota Jones
Tout a commencé par une approche à gravel aux côtés de Scott Simmons, avant de retrouver Dakota Jones – son coéquipier chez NNormal et ultratraileur – au pied du Mount Sneffels (4 274 m).

La traversée sauvage du Lizard Head Wilderness
Kilian et Dakota ont pédalé vers l’ouest, en direction du Lizard Head Wilderness, l’un des secteurs les plus isolés du Colorado. Leur objectif ? Une traversée de 41 km enchaînant :
- Wilson Peak (4 342 m) – reconnaissable à sa forme de pyramide parfaite.
- El Diente Peak (4 315 m) – un sommet aux arêtes tranchantes et aux passages en pas d’escalade de 4.
- Mount Wilson (4 342 m) – souvent confondu avec son voisin, mais tout aussi exigeant.

Après plus de 18 heures d’effort, Kilian a bouclé cette étape bien après la tombée de la nuit, ajoutant quatre nouveaux sommets à son palmarès. Avec cette journée, il portait son total à 52 fourteeners en seulement deux semaines.
🏔️ Sommets de 14,000 : 52
Étape 13 : Le final en apothéose dans le cœur sauvage du Colorado
Le 13ᵉ et dernier chapitre de la quête dans le Colorado s’est déroulé dans le Chicago Basin.
Une approche longue et froide
Tout a commencé par une transition à gravel bike glaciale jusqu’au Purgatory Flats Trailhead, suivie de quatre heures de course… juste pour atteindre le début de l’ascension.

Son objectif ? Les quatre fourteeners les plus isolés du Colorado :
- Mount Eolus (4 327 m) – un sommet mystique, accessible seulement après une longue approche.
- North Eolus (4 276 m) – souvent négligé, mais tout aussi beau.
- Sunlight Peak (4 317 m) – célèbre pour son arête exposée et ses passages techniques.
- Windom Peak (4 308 m) – le dernier de la liste, et non des moindres.
Dakota Jones, son compagnon d’aventure, a résumé : « Je ne suis pas habitué à faire autant avec si peu de sommeil. Ce que fait Kilian est incroyable. Ce sont sans doute les fourteeners les plus reculés du Colorado : quatre heures pour entrer, quatre heures pour sortir. Une façon spectaculaire de finir ».

Mission accomplie pour le Colorado : 56 fourteeners en 16 jours
- 🏔️ 56 sommets de plus de 4 267 m – l’intégralité des fourteeners accessibles de l’État (il n’a pas gravi un sommet privé pour lequel l’accès est payant)
- 🚴🏃 2 007 km parcourus (à pied ou à vélo)
- ⏱️ 267 heures, 10 minutes et 18 secondes d’activité
- 📈 79 176 mètres de dénivelé positif
Je suis vraiment excité d’avoir terminé ce voyage dans les fourteeners du Colorado de cette manière. Le Chicago Basin est magnifique, ultra-reculé à cause de l’approche interminable, avec du scrambling génial et des vues à couper le souffle depuis les sommets
Cinq jours de transition à vélo : 875 km pour rejoindre la Sierra Nevada
Après son épopée dans le Colorado, Kilian a enchaîné cinq jours de vélo, couvrant 282 km par jour pendant 14 heures en moyenne. Un effort colossal pour rallier la Californie, où l’attendait un nouveau défi : Norman’s 13.
Etape 15 : Norman’s 13
Au programme de l’arrivée en Californie, le Norman’s 13, l’équivalent du Nolan’s 14 avec donc… un sommet de moins. Le Norman’s 13, c’est treize sommets de plus de 4 000 mètres enchaînés sur une distance de 160 kilomètres, incluant une portion du mythique John Muir Trail, pour un dénivelé positif de 12 000 mètres. Contrairement à certaines de ses aventures solitaires, Kilian a cette fois été accompagné par des figures locales de la montagne. Dès le départ, Matt Zupan, détenteur du record en autonomie sur ce parcours, et Rod Farvard se sont joints à lui. Plus tard, Olivia Amber, qui a établi le record féminin sur le Norman’s 13 seulement deux semaines auparavant, l’a rejoint au Taboose Pass.

C’était incroyable d’avoir de la compagnie : des gens sympas qui couraient avec moi, partageant les mêmes valeurs et le même lien avec ces montagnes », a confié Kilian. « Olivia a établi le FKT ici il y a quelques semaines, Matt connaît ces sommets par cœur. C’est inspirant de partager le sentier avec des personnes qui ont une partie de leur âme dans cette chaîne.

La Sierra Nevada a offert son mélange de beauté et de brutalité. Les tempêtes de neige ont frappé pendant les passages les plus techniques, et des journées entières se sont écoulées sans qu’il ne croise un seul être humain. Un incident, un pied écrasé sous un rocher, a ajouté à la difficulté, tout comme la fatigue accumulée, particulièrement ressentie lors de l’ascension du Mount Sill. Malgré ces défis, Kilian a terminé le parcours en 56 heures, 11 minutes et 4 secondes, établissant un nouveau record avec assistanc, (en attente de confirmation officielle).
🏔️ Sommets de 14,000 : 69

Etape 16 : White Mountain
Après une rare nuit de repos à Bishop (douche chaude, pizza, lit d’hôtel), Kilian a enchaîné avec White Mountain (4 344 m) via sa crête ouest.
Contrairement à certaines de ses ascensions précédentes, où le rythme était dicté par des objectifs de temps, Kilian a cette fois laissé son corps guider l’allure et cette fois-ci l’ascension a pris plus de temps que prévu. Plutôt que de forcer, il a choisi une approche patiente et contemplative. Cette ascension illustre une dimension clé de « States of Elevation » : l’art de doser l’effort ; parfois, la montagne t’apprend que la vitesse n’est pas tout.

Au retour, Jason Hardrath l’a rejoint pour la route vers le nord, où deux nouveaux 14.000 entendent Kilan Jornet : le Mont Shasta et le Mont Rainier.
🏔️ Sommets de 14,000 : 70

Etape 17 : Le Mont Shasta
Après avoir marqué son passage sur White Mountain, Kilian a pris la direction du nord, traversant le Nevada et la Californie pendant deux longues journées à vélo, droit vers le Mont Shasta à 626 kilomètres de White Mountain.

Le 71ᵉ sommet dans des conditions extrêmes
Le 30 septembre, Kilian se tenait enfin sur le sommet du Mont Shasta (4 322 m), son 71ᵉ sommet de plus de 4 000 mètres. Mais l’ascension ne fut pas de tout repos. Il a dû affronter ce qu’il a décrit comme « l’un des trois vents les plus fous que j’aie jamais eus en montagne », avec des températures ressenties à -20°C. La montée a également été marquée par de la neige fraîche, un rappel brutal que, même à ce stade avancé du projet, la montagne ne pardonne pas. « Un bon rappel pour ne pas baisser la garde », pourrait-on résumer.
🏔️ Sommets de 14,000 : 71
À suivre…

















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